Cyril et la cité oubliée, deuxième partie
Bonjour les aminautes, nous nous retrouvons en compagnie de Cyril, pour la deuxièma partie de son aventure en Amérique du Sud ...
Vous vous demandiez ce qu'il lui était arrivé ? Et bien voilà ...
Cyril se laissait dériver, porté par les courants aériens.
Que s’était agréable ! Voguer ainsi dans un ciel d’une pureté de cristal, un air pur et vif, tranchant comme un diamant. Le froid lui mordait les écailles, mais il n’y prenait pas garde, tant la beauté de ce qu’il voyait absorbait toutes ses pensées.
A perte de vue la montagne et ses sommets d’un blanc immaculé. Le soleil au-dessus de lui, jouait des ombres bleues et violettes sur les parois, dessinant des ombres comme autant de chefs d’œuvres créés par un peintre particulièrement inspiré.
Il avait croisé un condor un moment avant, seul occupant de cet espace raréfié. L’oiseau s’était approché, et ils avaient échangé quelques mots courtois, avant de se séparer. Le condor rentrait chez lui, et lui avait conseillé de ne pas se laisser surprendre par la nuit en altitude. Une ville dans la neige ? Non, il n’en avait jamais vu, mais cela ne voulait pas dire grand-chose, la montagne était immense, avait-il ajouté, en voyant la déception de Cyril.
Il lui avait souhaité une bonne fin d’après-midi et avait poursuivi son chemin. Cyril avait admiré la facilité que le condor avait pour planer. Lui-même n’y arrivait pas si aisément, ses ailes manquaient d’envergure, bien qu’elles aient grandi et se soient considérablement renforcées.
Il était loin le temps où il avait peiné pour monter son livre sur la table de Cerise ! Sa médaille d’argent aux jeux weblympiques en témoignait.
Tout en se remémorant des souvenirs qui lui paraissaient lointains, bien que vieux de seulement quinze mois (en temps du monde réel) il continuait d’admirer les parois illuminées de soleil, les sommets immaculés, les champs de glace en contrebas, présentant toutes les nuances du bleu en reflétant le ciel. C’était à la fois beau et apaisant, et le dragon se disait qu’il aurait pu rester des journées entières à voler ainsi, entre azur et violet.
A ce moment, un reflet toucha son œil droit, lui faisant tourner la tête. Là-bas il y avait la paroi de la montagne, immense et abrupte. Le soleil avait dû frapper un cristal de glace et faire cet éclat qu’il avait vu sans le voir.
Il battit des ailes pour continuer à avancer, et là, il revit le reflet. C’était très brillant, couleur rayon de soleil, et venait d’un point à peu près au milieu de la paroi du glacier. Il approcha davantage, et s’aperçu que là où le soleil avait créé le miroitement, s’ouvrait une faille dans la montagne.
Elle n’était pas très large, tout en hauteur, et très sombre. De là-haut, il ne l’aurait jamais vue, s’il n’y avait eu cet éclair de lumière, et d’ailleurs, d’en bas elle devait être tout aussi invisible. Cyril eut un moment d’hésitation, puis la curiosité l’emporta, il se posa délicatement sur le rebord de la faille. Il ne faisait pas si noir que cela, le jour pénétrait encore assez largement, et le dragon put avancer sans problème. Avancer, ou plutôt se faufiler, le passage était fort étroit. Après quelques mètres, la faille s’élargissait un peu, devenant une salle au contour arrondi.
C’était un éblouissement, le sol était littéralement jonché d’objets en or. Des masques, des armes, des coupes, des bijoux, et même le cadre d’un miroir qui était posé contre la paroi. C’était lui qui avait brillé, et attiré le regard de Cyril sur la faille.
Il fit quelques pas, en faisant bien attention de ne rien écraser sous ses pattes. Ainsi il y avait bien des vestiges du passage des hommes plus loin dans la montagne. Ce n’était pas vraiment une surprise, mais en se trouvant nez à nez avec la certitude, Cyril se sentait gagné par l’excitation. Il resta un bon moment à examiner les objets, les prenant avec soin, puis les reposant au même endroit. Que de beauté !
Il se regarda un moment dans le miroir, voyant un dragon un peu trouble sur la surface assez poussiéreuse de l’objet, puis vint admirer le cadre travaillé de plus près, tout en passant une patte légère pour ôter un peu de poussière. A sa grande surprise, il sentit de l’air glisser sur ses doigts, alors que la caverne était assez confinée. Il ouvrit une patte, présentant la paume, pas de doutes, il y avait de l’air qui circulait par là, qu’est-ce que ça voulait dire ?
Cyril sentit son cœur battre dans son poitrail, la nervosité monter d’un cran, quand il prit le miroir pour le déplacer sur le côté. Il était lourd, encore un petit effort !
Centimètre par centimètre, le miroir glissa le long de la paroi, révélant un autre passage qui s’enfonçait bien plus loin dans la montagne. L’air qui en sortait était paradoxalement doux, et très parfumé. Cyril pouvait sentir les fleurs, l’herbe, c’était vraiment étrange !
Son hésitation dura peu, il s’engagea dans le passage..
C’était vraiment très étroit, et obscur. Plusieurs fois Cyril eut l’impression qu’il allait rester coincé, et dut retenir sa respiration pour continuer d’avancer. Retourner en arrière ? Vraiment impossible ! Dans quel guêpier s’était-il fourré ?
Au bout d’un moment la faille s’élargissait un peu, et le dragon put mieux respirer et marcher plus facilement, ouf ! Il s’était vraiment senti mal à l’aise pendant un moment, obligé de progresser à tâtons dans ce boyau en s’écorchant les écailles sur la paroi rugueuse. Un peu de jour arrivait à présent, lui permettant de voir où il posait ses pattes, et aussi que la pierre avait été grossièrement taillée, pour permettre le passage à taille humaine. Il sentait de plus en plus nettement l’air tiède, et aussi le parfum végétal qu’il avait deviné dans la caverne aux trésors.
Comment pouvait-il sentir un tel parfum en pleine haute montagne ?
Le jour se faisait plus clair, se transformant en lumière doré devant lui, alors que le passage s’élargissait, devenant une sorte de vrai couloir. Par terre, ça et là, des objets étaient posés, abandonnés si on en croyait la couche de poussière. Des poteries cassées, un coffre en bois, une pièce de tissu déchirée. Rien de comparable aux merveilles de ce qu’il appelait l’antichambre.
Encore quelques pas, une large ouverture apparut, et le ciel bleu qu’il avait quitté de longues minutes auparavant. Tout heureux de retrouver l’air libre, Cyril s’avança jusqu’au bord de la brèche et ce qu’il vit lui coupa le souffle.
En contrebas, plusieurs centaines de mètres en-dessous de là où il se trouvait, s’étendait une vallée comme il n’en avait encore jamais vue. Entièrement ceinturée par les vertigineuses murailles montagneuses, elle était immense, alternant la forêt aux espaces cultivés. Plusieurs rivières coulaient, dessinant des rubans argentés sous le soleil, et tout là-bas, au pied de la paroi opposée, des fumées qui montaient signalaient une présence et des habitations, dont d’ailleurs il apercevait les toits. La profondeur de la vallée, l’isolant ainsi de l’air froid tout en assurant l’ensoleillement expliquait cette végétation tropicale, et la douceur du climat. C’était vraiment un endroit de rêve, parfaitement isolé de l’extérieur et pratiquement invisible puisque le survoler était aussi très difficile, étant donné la hauteur de la montagne.
Sans plus réfléchir, Cyril s’élança et s’envola pour descendre vers la rivière qu’il voyait juste en dessous de lui. Il se posa sur une herbe épaisse et grasse, but un peu, et repartit en suivant l’eau qui serpentait dans la forêt.
Il vit un peu partout qu’une main humaine avait sculptée la nature. Des chemins avaient été tracés, et les berges de la rivière étaient soigneusement entretenues pour que rien n’entrave le courant.
Il ressortit bientôt du couvert des arbres pour se trouver dans un champ cultivé. Les épis de mais dressaient leurs lourdes têtes, irrigués par la rivière voisine. Plus loin, des tomates, un carré de ce qui devait être des pommes de terre. Puis des arbres fruitiers, et tout là-bas, un village assez important.
Cyril hésita, pouvait-il aller à la rencontre de ces gens ? Ils devaient vivre isolés depuis longtemps, et il ne voulait pas les perturber. Il allait rebrousser chemin, quand des rires juste derrière lui le firent sursauter. Il se retourna pour se trouver face à trois petites filles d’une dizaine d’années, qui avaient l’air de beaucoup s’amuser en le regardant.
Elles étaient très jolies, avec leurs tresses d’un noir brillant, leur peau mate et leurs yeux bruns. Leurs robes étaient très chamarrées, brodées de motifs floraux, et à leurs poignets des bracelets d’or étincelaient.
– Bonjour, fit Cyril, de son ton le plus amical
– Bonjour, fit la plus grande, qui se détacha du petit groupe pour venir le dévisager sous le nez.
Qui es-tu ? Tu as une drôle d’allure !
Elles avaient vraiment l’air de se moquer de lui, et Cyril se sentit un peu vexé.
– Je m’appelle Cyril, et je suis un dragon.
Ce qui les fit pouffer.
Au moins elles n’avaient pas peur, se dit Cyril. La deuxième se rapprocha à son tour :
– Et comment es-tu arrivé ici ?
– Par la montagne, un passage.
– Tu as retrouvé l’ancien passage ?
Elles reprirent un peu de sérieux :
– Tu es seul ? Tu ne vas pas dire à quelqu’un que nous sommes ici ? Le village doit rester secret !
– Bien sûr que non, fit Cyril, indigné.
– Allez viens, on t’emmène avec nous, tu vas rencontrer notre roi.
Et elles prirent Cyril chacune par une patte, pendant que la troisième les précédait en sautillant sur le chemin. Ils arrivèrent ainsi dans d’autres champs, ou des villageois travaillaient, qui se redressèrent en voyant le quatuor arriver. Cyril se trouva très vite entouré d’hommes et de femmes qui parlaient tous en même temps, et qui semblaient à la fois assez étonnés et inquiets de sa présence. La direction du village fut reprise en groupe, et c’est très accompagné que Cyril arriva jusqu’à la maison du roi. Au passage, il avait admiré les constructions, reposant sur des fondations en pierres parfaitement maçonnées.
Mais l’heure n’était plus à l’intérêt pour l’architecture, le roi arrivait, sortant de sa maison, une demeure plus grande et plus belle que les autres. L’homme lui-même était imposant, de grande taille, avec un visage sévère. Un collier pectoral en or finement travaillé attestait de sa prééminence.
A son arrivée, les villageois se turent, prenant une attitude de respect, et reculèrent laissant Cyril seul. Le dragon ne savait pas vraiment comment se conduire, et opta pour une réserve polie, attendant qu’on lui adresse la parole.
– Tu te nommes Cyril, m’a-t-on dit ?
– Oui messire.
– Et tu es arrivé par hasard jusqu’à nous ?
– Oui messire, je volais quand j’ai aperçu le reflet de l’or dans la caverne, là-haut.
– Et tu dis que tu es seul ?
– Oui messire, personne n’est venu avec moi.
– Cette vallée doit rester un secret, et je ne sais pas si je dois te laisser repartir.
Cyril sentit un petit frisson lui passer dans le dos
– Mais messire…Je dois rentrer chez moi, on m’attend, mes amis m’attendent. Je vous promets que votre secret restera bien gardé.
Le roi le fixa avec intensité.
– Je veux bien te croire.
Qui fit pousser un soupir de soulagement à Cyril.
– Mais il faudra prêter serment !
Un murmure monta de la foule derrière lui, qu’est-ce que ça voulait dire ?
– Nous avons abandonné les anciennes traditions sacrificielles, sauf celle-ci, et si tu veux repartir, tu dois t’y plier. Que l’on amène les instruments du rite !
Cyril était franchement inquiet, qu’allait-il se passer, et que devrait-il faire ? La foule s’agitait, prêter serment n’était manifestement pas une affaire à prendre à la légère !
Un homme sortit de la demeure royale, portant une sorte de grande coupe, et quand il fut plus près, Cyril vit que dans l’objet se trouvait un poignard à large lame, au manche en or figurant un jaguar incrusté de jade et de pierres précieuses. Son anxiété monta d’un cran, en voyant le roi prendre le poignard :
– Ce serment nous liera pour la durée de nos vies. A toi il t’impose le silence, à moi de te traiter en ami.
Et d’un geste sec il s’entailla le poignet, faisant couler le sang dans la coupe, puis tendit le poignard à Cyril sans un mot.
Le dragon le prit délicatement, sentant son cœur s’emballer. Allons, il fallait faire bonne figure, et d’ailleurs, il lui arrivait de se couper, comme tout le monde. Oui mais de cette façon…
La lame pointa vers l’intérieur du poignet, glissa entre les écailles, là où elles sont les plus fines, et un sang vermeil coula dans la coupe, pendant que Cyril serrait les dents. Heureusement les dragons cicatrisent presque immédiatement ! Le roi reprit la coupe, l’éleva en offrande vers le soleil, puis de la pointe du poignard, fit tomber quelques gouttes du sang de Cyril sur le sol.
Le liquide écarlate se mit à grésiller, avant d’être absorbé par la terre, et presque tout de suite une belle fleur rouge sortit et s’épanouit. Un murmure d’approbation courut dans l’assemblée, et le roi se permit un sourire. Cyril lui, regarda le phénomène avec des yeux ronds, absolument ahuri. La dernière fois qu’il s’était coupé avec un verre cassé chez lui, il avait eu une belle tache sur sa moquette, pas une fleur ! Et dire qu’il ne pourrait pas en parler !
– Tu es des nôtres maintenant, et je te convie au repas du soir.
Cyril s’inclina, murmurant quelques mots de remerciement, tentant de se remettre de ses émotions, alors que les villageois l’entouraient pour le congratuler, et que les trois petites le reprenaient par les pattes pour l’entraîner vers la table commune.
Les assiettes disparaissaient sous les épis de mais grillés, les tomates, les pommes de terre épicées. Du chocolat fut servi, très différent de ce que Cyril avait l’habitude de boire pour son petit déjeuner. Il était noir, épais, terriblement fort, amer et épicé. Un régal.
Le lendemain, après des au-revoir émus, deux hommes l’accompagnèrent jusqu’au pied de la montagne, qu’il prit l’un après l’autre sur son dos pour les amener jusqu’à l’entrée de la faille. Ils avaient une échelle de corde pour redescendre, mais en attendant ils devaient faire quelque chose. Ils accompagnèrent Cyril de l’autre côté du passage, attendirent qu’il ait disparu dans le ciel, puis refermèrent l’entrée de la grotte avec une grosse pierre.
Cette aventure est une nouvelle fois publiée en lien avec Catherine et son challenge spécial dragon
Bisous bien flambés !