Jour de grève dans l'espace
Et parce que deux, c'est encore mieux,
toujours pour le défi N°32 des croqueurs de mots, piloté par Nounedeb
Jour de grève dans l’espace
Ici l'envoyé spécial du journal "la planète "
Ce que je vois est incroyable, ahurissant. La foule est en train de quitter la plage en masse. Grands-mères, enfants, parents.. Tous partent, et le mécontentement est général !
Que font les responsables !
La journée promettait d’être chaude et sans une ombre.
Le sourire de Géraud s’élargit, une journée sans ombre était une journée calme. Bien sûr, il fallait le reconnaître, devoir suivre quelqu’un et faire les mêmes gestes jour après jour n’avait rien de bien distrayant, mais être escorté d’une ombre qui tenait des discours enflammés et revendicatifs, n’était pas non plus de tout repos, et la sienne était du genre militant. Il avait été tout à fait d’accord quand elles avaient obtenu leurs nouveaux statuts, avec repos hebdomadaires définis par convention collective, et avait applaudi des deux mains quand son ombre avait été élue déléguée. Il y avait bien eu des rabats-joie qui exigeaient des leurs une présence permanente sans le moindre arrangement possible, mais ceux là avaient dû bien vite faire machine arrière devant les grévistes. Ils se retrouvaient affublés d’une image de la réprobation incarnée, fixe, le dos raide et les bras croisés. On murmurait sur leur passage, et le terme d’exploiteur, de briseur de grèves, voire d’esclavagiste n’était pas loin. Ils avaient donc cédé, et les choses étaient rentrées dans l’ordre.
On était ensuite passé aux accords de branche avec les ombres végétales, afin qu’elles acceptent des congés en dehors des jours de plein soleil, et continuent de protéger les êtres matériels. Quant aux ombres animales, elles prenaient le même jour que les ombres humaines.
Tout paraissait donc au mieux, et la journée allait être des plus calmes. Géraud repoussa sa couverture et sauta hors de son lit. Il vérifia à ses pieds, rien, pas d’ombre, jusque là tout était normal, elles avaient prévu une journée à la campagne.
A peine sorti, il senti que quelque chose n’allait pas, et en effet, son voisin de palier, Acamar se précipita vers lui en gesticulant :
– C’est la catastrophe !
Géraud avait comprit avant même les explications :
– Les végétales se sont mise en grève aussi !!
– Comment as-tu deviné ??
et sans attendre de réponse :
– Elles se sont mises en grève, et elles sont parties au bord de la mer, en disant qu’elles aussi avaient droit au beau temps. Non seulement ici, plus rien pour se protéger, mais en plus, sur les plages, les touristes ne peuvent plus se faire bronzer, avec toutes ces ombres rassemblées là. Non allons perdre des milliers de réservations avec cette histoire, et il y en avait de toute la galaxie, c’est un désastre !
Géraud réfléchit un instant :
– Je crois que j’ai une idée…
Quelques heures plus tard, tout était rentré dans l’ordre. Les arbres étendaient des ombres bienfaisantes, et dignes, quoique dans un silence réprobateur, et les plages étaient à nouveau ensoleillées.
– Comment as-tu fait, demanda Acamar.
– Leur revendication est bien légitime, mais faire ainsi grève sans préavis était inadmissible, après les accords passés. Je les ai donc prévenues que si elles ne négociaient pas, le soleil allait se lever directement au zénith et y rester jusqu’à la nuit dans les jours à venir. Comme tu sais, elles n’aiment pas cette heure là, ajouta Géraud en riant. Elles l’ont traité de jaune mais
nous avons donc renégocié, et avons trouvé un terrain d’entente, elles auront aussi leur jour de congé ensoleillé.
– Le soleil a vraiment accepté ?
– C’est un vieux ronchon, mais maintenant il me doit un service.
Je te laisse, je vais chercher cette petite comète qu’il voulait absolument rencontrer. Elle ne va pas tarder.