A l'abordage défi N° 74: objets inanimés, avez-vous une âme?
Cette quinzaine, c'est Enriqueta qui est à la barre des croqueurs de mots, la communauté de Pascale et qui nous a proposé comme thème :
Qui n'a jamais aimé un objet démesurément (et pas seulement quand vous étiez enfant) ?
Qui n'a jamais cru qu'une machine pouvait avoir une personnalité ?
Qui n'a jamais personnifié un objet (en lui donnant un nom par exemple) ?
Qui n'a jamais parlé à une machine ?
Choisissez un objet / une machine et racontez nous sa vie humanisée et ses relations avec vous (ou avec un autre humain) qu'elles soient positives ou négatives.
Dialogue
Je vous ai déjà parlé d’uncoffre, conteur d’histoires anciennes. D’un ascenseur capable d’initiatives. D’une rencontre … avec une très grande amie. D’un petit dragon croisé dans un magasin du bord de Seine, mais là, pour ce nouveau défi, pour bâtir une nouvelle chronique … Pas d’idées, pas d’inspiration. Rien, la panne sèche devant l’écran, avec pour seule perspective la reprise d’un texte plus ancien …
‒ Tu pourrais me donner la parole pour une fois !
‒ Quoi ? Qui parle ?
‒ Oh ne fais pas semblant, tu sais très bien !
Là, je dois reconnaitre que j’ai eu un doute sur ma bonne santé. Pourtant, je me sentais dans un état normal, pas de fièvre, pas de douleurs à la tête, et j’étais bien réveillée.
La voix était proche, toute proche même. Une voix agréable, de tonalité masculine, très bien élevée, et même un peu ampoulée. Le genre anglais « old fashion » si vous voyez ce que je veux dire, malgré le tutoiement.
‒ C’est toi ?
‒ Bien sûr ! Qui veux-tu que cela soit ? Nous passons pas mal de temps ensemble, au moins trois ou quatre heures par jour. Je ne compte pas mon temps, moi ! Et je travaille beaucoup, alors tu pourrais me laisser m’exprimer. Ou bien est-ce que tu ne serais pas contente de mes services ?
‒ Mais si !
‒ Est-ce que tu ne trouves pas que je fais les choses au mieux ? Que je ne suis pas assez rapide ?
‒ Tu es tout à fait parfait, à part peut-être …
‒ Oui ?
Le ton était un peu pincé tout à coup.
‒ Tu es un peu lent au démarrage !
‒ Hmmm … Il faut dire aussi que tu as beaucoup de scripts à exécuter. Je fais ce que je peux, mais pour l’impossible, il faut un peu de patience (le ton était franchement acidulé)
‒ Ce n’est pas très grave (je me sentais presque en faute) J’en profite pour faire autre chose, en attendant que tu affiches le tout.
‒ Hmmm … Bien, tu me laisses parler ?
‒ Mais je t’en prie !
Bien sûr, vous avez compris que mon interlocuteur du moment était mon compagnon fidèle, mon ordinateur.
‒ De quoi veux-tu discuter ?
‒ Et bien, justement, de mes conditions de travail !
C’était mon tour d’être vexée.
‒ Tu trouves que je te maltraite !! Tu es bien installé sur la table. Je ferme le capot quand tu n’es pas en marche. Je passe le chiffon, je fais attention de ne pas laisser de miettes, et je tape mes textes doucement. Les mises à jour sont faites, et l’anti-virus est actif. Tu ne vas quand même pas te mettre en grève ?
‒ Oui, oui, je le reconnais, tu prends soin de moi.
‒ Alors, qu’est-ce qui ne va pas ?
‒ Et bien …
Je crois qu’il était en panne d’inspiration, tout autant que moi, mais lui pour trouver des motifs valables de se plaindre. Serait-il un champion de la mauvaise foi ?
J’ai contre-attaqué :
‒ Et puis je te confie des photos qui ne sont pas mal, il me semble. Sans parler des allées et venues de tout le monde qui vient en visite, les passages de Cyril, et les visites de sites de musées et de peinture. C’est assez agréable comme programme, non ?
‒ Ça manque un peu de variété !
‒ Tu voudrais plus de randonnées sur les sites de vidéos ? L’autre soir nous avons écouté les sons de l’espace pendant un bon moment.
‒ Oui, mais moi, ce que j’aime c’est la musique qui bouge.
‒ C’est promis, je t’emmènerai en balade dans les sites où on s’agite plus. Ça ira comme cela ?
‒ Bon d’accord, je suis assez satisfait, nous faisons du bon travail.
‒ Tout va bien ? Nous sommes amis ?
‒ Mmmoui. Nous sommes amis.
‒ En tous les cas, j’ai été surprise de t’entendre, comme cela, tout d’un coup, mais ça me fait vraiment plaisir ! Tu veux parler aux croqueurs ?
‒ Bonjour les aminautes !
Voilà, vous savez tout, et vous avez notre bonjour de notre part à tous deux.