Les vacances de Cyril: aventures dans les îles 8
Cyril en Polynésie (suite )
– Alors Cyril, ce voyage ?
– Magnifique ! Passe à la maison, j’ai des tonnes de photos ! Là, je dois me presser pour aller dans mon blog.
– Et oui, la rentrée. D’accord, à plus tard !
Cyril se dépêchait pour arriver à l’heure dans le blog de Cerise. Celui qui venait de l’interpeller ainsi était un des pages au service de Magnus Discus, qu’il croisait souvent dans le couloir en sortant de chez lui, si bien qu’ils avaient fini par nouer une solide amitié, et passaient souvent un moment ensemble, devant une tasse de chocolat, chez l’un ou chez l’autre.
Cette question il l’avait entendue déjà des dizaines de fois, depuis vingt-quatre heures qu’il était rentré de son périple en mer.
Quel voyage !
Il ne put s’empêcher de soupirer, en repensant à tout ce qu’il avait vécu pendant ces semaines de vacances, et la dernière restait imprimée dans les moindres détails dans son esprit.
Il pouvait encore sentir le parfum de vanille, de coco, de feuillage…
Les murs du château du royaume Pc s’effacèrent pour laisser la place à un ciel bleu turquoise, parsemé de petits nuages blancs comme de la crème, une mer transparente dont les vaguelettes venaient lécher le sable doré de la plage. Au loin, au mouillage, l’Altaïr et le Dénébola se balançaient doucement.
L’Altaïr était arrivé un peu plus tôt dans l’après-midi. Cyril avait aperçu l’île avant tout le monde, du haut de sa vigie et ne se tenait plus d’impatience. C’est qu’Abby devait l’attendre à bord du Dénébola. Elle était arrivée à tire-d’aile, et les deux dragons avaient fait le restant du chemin volant côte à côte, pour se poser sur la plage où de jeunes îliennes rieuses lui avaient passé une quantité de colliers de fleurs autour du cou.
L’arrivée à terre de Barbe d’Or avait été nettement plus solennelle, il apportait des présents d’usage, et la reine des îles s’était déplacée en personne pour le voir.
Le capitaine de l’Altaïr offrait de très belles perles, qui viendraient compléter la collection de la reine avec bonheur. Puis, lui et son équipage passeraient la soirée sur l’île, pour repartir le lendemain pour une nouvelle campagne de piraterie.
Cyril, lui, changerai de bateau, pour s’installer à bord du Dénébola et passer cette dernière semaine de vacances avec Abby.
En attendant, une fête était prévue pour le soir même, à laquelle les deux équipages au grand complet étaient conviés, sans oublier bien sûr les dragons.
Cyril avait des cadeaux pour Abby, et en volant vers l’Altaïr, elle lui avait expliqué qu’il y aurait un grand festin, des chants et des danses. Cyril s’était déjà senti très impatient autant que curieux, c’était la première fois qu’il allait assister à un luau , la grande fête polynésienne.
Tous deux s’étaient posés sur le pont de l’Altaïr, faisant sursauter l’homme de quart qui s’était un peu assoupi sous le soleil tropical, Cyril était descendu en vitesse à sa cabine pour remonter les petits cadeaux choisis pour Abby. Les bonbons, la breloque en forme de trèfle, avec sa chaînette pour porter en bracelet, et l’écharpe rouge et or, les couleurs de la jeune dragonne.
Celle-ci avait été ravie, déposant un bisou sur la joue de Cyril, avant d’ouvrir le paquet de bonbons et d’en déguster chacun un. Le bracelet mis, l’écharpe coquettement nouée autour du cou, les deux dragons étaient repartis vers la plage.
Il n’y avait plus personne, un brouhaha de voix montait de derrière la ligne de cocotier, là où le village était construit.
Les deux dragons voulurent rester encore un moment, profiter du paysage et du calme de la plage déserte. Ils s’amusèrent à se tremper les pattes, à s’éclabousser un peu, puis à marcher sur le sable doré, sans rien dire, simplement savourant le plaisir d’être ensemble.
Une voix de stentor les avait appelés :
– Alors les dragons, vous venez ! Il faut aider pour la préparation de la fête !
Ils s’étaient regardé en riant, puis avait rejoint le village d’un seul coup d’aile, où l’animation battait déjà son plein.
Les maisons traditionnelles, avec toit de feuilles tressées, étaient disposées en rond autour d’un vaste terre-plein central, où brûlait un grand feu.
Les hommes s’activaient pour apporter du bois, des feuilles de palmier, qui serviraient pour s’asseoir, où pour envelopper la nourriture, pendant que les femmes terminaient de préparer le repas, le tout dans l’ambiance assez survoltée qui précède une fête.
Une rangée de tambours attendait les joueurs, avec divers instruments de percussions. De jeunes gens, garçons et filles, un peu à l’écart, finissaient de mettre la dernière main à leurs costumes de danse, et à leur coiffure pour les filles.
Abby avait été requise pour aider, pendant que Cyril était happé par plusieurs garçons, qui l’entraînaient vers un groupe entourant quelqu’un à l’activité mystérieuse.
Le cercle s’ouvrit, et Cyril put voir qu’il y avait là un tatoueur en action, qui terminait de parfaire une courbe sur une épaule. Il admira les dessins qui couvraient une partie du torse du jeune homme, pendant qu’un autre lui expliquait que ces arabesques élégantes décrivaient l’histoire du garçon, à quelle famille il appartenait, son rang dans le village.
Tout de suite le tatoueur proposa au dragon de lui dessiner quelque chose. Oui, mais quoi, et comment ? Difficile sur des écailles, et Cyril, sans l’avouer, ne se sentait pas trop rassuré !
On transigea avec un dessin fait avec une encre obtenue par des plantes.
Cyril s’installa, et le tatoueur commença, avec des gestes précis et assurés, sur le haut de la poitrine du dragon, et son épaule. Une demi-heure plus tard, un beau dessin traditionnel se déployait en arrondi, donnant à Cyril le statut de jeune guerrier dans le groupe. Il se sentit très fier de l’honneur fait, et espéra secrètement qu’Abby serait impressionnée.
Le soir était tout à fait tombé, depuis déjà une heure, quand les préparatifs enfin terminés, tous attendirent la venue de la reine pour commencer la fête.
Celle-ci arriva au bras de Barbe d’Or, s’installa un petit peu à l’écart avec les deux capitaines, entourée d’une nuée de jeunes gens pour la servir. Le restant des villageois et des équipages, s’installait par terre, sur les piles de feuilles de palmier, ou sur des nattes tressées, ou encore de petits sièges en bois pour les plus âgés.
Le repas commença, animé, bruissant de discussions. Cyril, assis à côté d’Abby, était assailli de questions par ses autres voisins. Le voyage, le royaume Pc, le monde réel… Tout y passait, parfois dans le plus grand désordre, pendant que se succédaient les délicieuses préparations, colorées par les fleurs et les fruits tropicaux. Et que de parfums ! La vanille, les mangues, la noix de coco, et le tiaré que les filles utilisaient pour leurs cheveux, qui s’exhalait doucement à la chaleur des feux. Abby en avait aussi un peu frotté ses écailles, et la suave fragrance ravissait Cyril.
La dernière miette de coco avalée, les musiciens s’installèrent à leurs instruments, et le son rythmé des tambours monta dans le ciel nocturne, pendant que les jeunes danseuses s’avançaient, balançant leurs hanches, faisant onduler les longues jupes en raphia.
Quelles étaient jolies ! Leurs cheveux noir ébène reflétaient le rouge des flammes, leurs visages souriant ne trahissaient rien de la difficulté de la danse, pourtant rapide et compliquée.
Puis vint le tour des garçons, danse de guerriers, faite pour impressionner un ennemi des temps anciens. Au grand embarras de Cyril, deux des danseurs se détachèrent du groupe et le poussèrent littéralement dans leurs rangs !
Le dragon fit de son mieux pour esquisser quelques pas, imitant ses voisins, sous les applaudissements des convives. Même la reine, personne très digne, avait l’air de beaucoup s’amuser. Quelques marins intrépides vinrent les rejoindre, pour essayer à leur tour, et la danse se termina dans la liesse générale, tous regagnant leurs places, pour écouter les chants traditionnels.
La lune avait déjà parcouru une bonne partie de son trajet nocturne, quand le silence finalement s’étendit sur le village. Un peu de rose pointait à l’horizon Est quand Cyril s’endormit, accueilli avec d’autres marins, dans une grande demeure, faisant un peu office de dortoir. Sur le moment, il se demanda s’il allait pouvoir dormir, en voyant les piliers sculptés, représentant des divinités assez impressionnantes, mais la fatigue l’emporta rapidement, lui procurant un sommeil peuplé de fleurs d’hibiscus et de chants.
La matinée avait été un peu triste, en disant au revoir à Barbe d’Or et son équipage. Cyril avait avant cela transporté ses affaires à bord du Dénébola, où une minuscule cabine l’attendait, dont la couchette occupait presque toute la place. Il était d’ailleurs question de ne pas bouger tant que cela, et de rester sur l’île, se reposer, et explorer la jungle toute proche, jusqu’à l’intérieur des terres.
Les adieux à Barbe d’Or et John le rouge avaient été très émus de la part de Cyril, comme des pirates. Après avoir vécu tant de choses ensemble ! Mais les retrouvailles ne sauraient trop tarder. Barbe d’Or invita Abby à son bord, si le Dénébola pouvait se passer un moment de figure de proue. D’ailleurs Viveca pouvait la remplacer sans problème. Rendez-vous fut pris, et Barbe d’Or monta dans le canote qui le ramenait à son bord.
– Allez garçons, souquez ferme ! Les galions chargés d’or et de pierres nous attendent !
Cyril se retint de rire, pendant que Abby, près de lui, étouffait un petit gloussement.
John le rouge assena une de ses tapes à assommer un dragon sur l’épaule de Cyril.
– Au revoir mon gars ! Heureux d’avoir navigué avec toi ! Tu fais un vrai bon marin.
Puis il considéra les deux dragons d’un œil acéré :
– Alors vous deux, à quand les fiançailles !
Sidérés, Cyril et Abby se regardèrent…
C’était si évident !
Pour ma communauté et celle de Cyril : un dragon pour ami